Une nouvelle ère

"Si cela s'est passé ainsi, mon enfant, c'est qu'il devait en être ainsi."

Sur ces mots, la vieille Betrud remplit le bol de Branehilde d'une soupe fumante. Elle ponctua son geste: "Tu devrais le savoir, depuis le temps".

La prêtresse rousse garda le silence. Elle savait, après toutes ces années passées dans sa consorie, que les paroles de la mère-superieure Betrud des Enclumières n'appelaient jamais à une réponse.

"Tu savais que tu ne trouverais pas ceux que nous cherchons à Kar Modan, n'est-ce pas ? Tu t'es attachée à eux et tu es restée en dépit de ta mission sacrée."

Branehilde comprenait tout à fait ce qu'on lui reprochait. Son devoir était de servir la Lumière, et non un obscur  régiment de Kalimdor. Elle avait fait voeu de renoncement. Ce n'était pas la première fois que Betrud lui faisait un tel reproche: déjà en Outreterre et en Pandarie elle avait laissé s'exprimer son désir de liberté et sa passion - fascination - pour le ciel. Dans les Tarides, elle avait apprecié la simplicité des profanes, une chaleur qu'elle ne retrouvait qu'après de ceux qui ne comprenaient rien aux réalités du monde. Elle avait décidé de rester parmi eux, mais rappelée à l'ordre avant le départ pour Draenor elle n'avait pu qu'apprendre la disparition de la Brigade depuis Forgefer.

Betrud marqua une pause. Il était temps pour elle d'annoncer à Branehilde sa pénitence.

"Tu partiras pour Menethil demain et tu prendras le premier navire pour le Norfendre. Loin de tout, en hermitage, tu méditeras et appendras à te défaire de tes désirs ; de tous les fardeaux de l'existence mortelle qui éloignent ton âme de la félicité de la Lumière."

Voyager au bout du monde pour une simple pénitence ? C'était une première. Mais avant que Branehilde n'aie eu le temps de formuler une objection, la matrone la coupa net: "Tu sais très bien où je veux en venir, ma petite. Ne compte pas sur moi pour te donner tous les indices, cette fois."